Cette rubrique cible les enjeux à mettre en avant et les arguments démontrant le réel apport de la biodiversité en ville. Elle vous fournit un argumentaire solide pour l’acceptation du projet.
A l’échelle humaine, la biodiversité rend des services indéniables tels que la fourniture d’une diversité d’aliments, de molécules pour le domaine médical, un cadre de vie et une attraction touristique, des systèmes de dépollution et de régulation (échanges gazeux O2-CO2 par exemple) et des matières premières (vêtements, meubles, matériaux de construction…).
Aux échelles du quartier ou du projet immobilier sur lesquelles nous nous concentrons dans le guide, les points suivants peuvent être mis en évidence :
La biodiversité a mis des milliards d’années à devenir ce qu’elle est aujourd’hui. Nous avons une responsabilité particulière dans la préservation de cette richesse. Il s’agit non seulement de notre base vitale mais aussi de celle de nos descendants.
A l’échelle mondiale et de l’humanité, la biodiversité fournit nourriture, médicaments, cadre et attraction touristique, système de dépollution, matières premières et bien d’autres services GRATUITS et INDISPENSABLES comme le rôle tampon des zones humides en cas d’incident climatique.
Affaiblir l’équilibre de la biodiversité, c’est affaiblir l’espèce humaine qui en tire profit comme toutes les autres espèces.
En ville, la biodiversité apporte des services gratuits à côté desquels nous passons sans nous en rendre compte : ombrage et brise vent, humidification et refroidissement de l’air en été, ressources liées aux jardins urbains et aux vergers…
Jardin communautaire à Montreuil (93), au pied d’une barre d’immeubles (Benoit Bourel)
Les sociologues ont détecté une perte d’humanité, de fonctionnalité et d’attractivité de la ville. L’intégration de la nature en ville est à même d’apporter une réponse sociale à ce problème. En effet, outre les atouts objectifs (structurels, fonctionnels…) la nature en ville s’est à de nombreuses reprises montrée créatrice de liens sociaux (jardins familiaux, concours jardins fleuris…). Elle est systématiquement associée à la notion de bien-être, de douceur et de calme.
Autour de sites ou de projets particuliers, la biodiversité fédère les habitants d’un quartier, facilite les échanges sociaux et attire les usagers vers des quartiers qui ont retrouvé leur convivialité. L’initiative des Jardins de l’Aqueduc, jardins partagés créés par les habitants d’un quartier sur une friche SNCF est un exemple concret parmi tant d’autres qui illustre en quoi la biodiversité participe aux relations sociales, à l’appropriation d’un quartier et à l’identité communautaire.
Dans un projet où le volet pédagogique est important (une école, un centre de réinsertion…) l’intégration de ces initiatives originales fera la différence.
La biodiversité doit être particulièrement mise en avant dans les projets pour lesquels la dimension pédagogique est importante. L’éducation des populations aux intérêts de la biodiversité peut se retrouver par la présentation et l’observation de la dynamique de la biodiversité dans les éléments intégrés. Les sciences participatives sont également un moyen de favoriser l’éducation à la biodiversité ordinaire.
Les préférences des citadins évoluent vers des nouvelles conceptions de villes vertes qui allient espaces de nature et proximité des services (Benoît Bourel)
Le besoin de contact avec la nature exprimé par les citadins est largement mis en évidence dans la littérature, pour différents usages (loisirs, travail, détente…) et à différents niveaux de besoin. Elle semble indispensable à l’équilibre physique et psychique de l’homme, à tel point que l’environnement urbain dominé par des espaces naturels remporte la majorité des préférences esthétiques. Même si le choix de l’habitat idéal varie selon la classe sociale, l’habitat individuel est souvent préféré.
Les citadins expriment à la fois un désir d’intimité et de grands espaces (vivre en pleine nature) et le désir de vivre ensemble dans une ville attractive qui offre le plus de services possibles (commerces, transports, loisirs, parcs…). La densification urbaine s’avère dans tous les cas nécessaire pour la ville durable de demain face à l’accroissement de la population. L’artificialisation des sols, due principalement à la croissance des villes a par exemple consommé 8700 ha en 2007 principalement au détriment des espaces naturels et agricoles.
L’intégration d’éléments vecteurs de biodiversité est une solution efficace pour résoudre les problèmes auxquels les urbanistes vont se trouver confronter. En permettant de combiner la nécessité de densification et le besoin de nature des urbains, elle est un des rare moyen permettant de combler ces désirs ambivalents (calme, intimité et ville vivante aux multiples services).
Côté confort, la présence de végétation par exemple permet d’améliorer l’effet d’îlot thermique rencontré en ville (climat moins sec, rafraichissement de la température. Le confort visuel (esthétique, ambiance) est d’autant plus apprécié que la présence de verdure est fortement désirée par les citadins. Les bruits de la nature agrémentent le fond sonore urbain. Les nuisances acoustiques sont diminuées car les ondes se répercutent sur les nombreuses surfaces que présentent les volumes de végétation.
A l’investissement, certains éléments particuliers proposent des solutions simples, peu coûteuses et favorables pour la biodiversité. Il n’est par exemple pas systématique d’imperméabiliser les sols, notamment là où la fréquentation n’est pas importante.
Pour le volet économique, les avantages se font le plus souvent sentir sur le long terme et dans la phase utilisation. Les plantes et leur substrat participent à l’isolation des bâtiments sur les toitures et murs végétalisés, les micro-organismes participent à la dégradation des déchets dans les parcs et au pied des arbres (déjections canines et autres dépôts organiques…), les zones gérées de manière extensives réduisent les coûts et accroissent l’infiltration...
La mise en place d’une gestion naturelle des eaux pluviales est l’exemple le plus significatif : la gestion de l’eau à la parcelle est exigée par de nombreux projets et la mise en place d’un système de noue permet de ralentir l’écoulement des eaux, de favoriser l’infiltration et même en partie de dépolluer pour ainsi limiter les désagréments en aval (notamment la saturation des réseaux).
Les noues dans les nouveaux quartiers remplacent les systèmes de gestion des eaux pluviales classique, favorisent la biodiversité et améliorent le cadre de vie.
A la revente, et même si les intéressés n’ont aucune notion et aucun attrait particulier pour la biodiversité, une construction facile à entretenir et verdoyante sera forcément mise en avant. L’aspect novateur et exemplaire de tels aménagements ne peuvent être que des atouts.
Les piscines biologiques s’appuient sur le principe de phytoépuration pour assurer la qualité de l'eau de baignade.
Les bienfaits sanitaires de la biodiversité urbaine se manifestent dans la dépollution de l’eau, de l’air et des sols. Pour preuve, les stations de phytoépuration mais aussi les stations d’épuration classique utilisent les plantes et/ou les micro-organismes associés pour dépolluer l’eau ; sur des sites très pollués (MetalEurop par exemple) certaines plantes peuvent être utilisées pour extraire les métaux lourds du sol ; les plantes sont également préconisées pour l’épuration de l’air intérieur. Il y a donc fort à croire que la démultiplication des éléments intégrant la biodiversité à toutes ses échelles. Des chercheurs ont prouvé l’efficacité des micro-organismes du sol dans l’épuration des eaux de ruissellement.
Les projets verdoyants, donc potentiellement riches en biodiversité, sont toujours un atout marketing (siège de Norpac, ERE park).
Il est certain qu’un projet verdoyant a toutes les chances de plaire visuellement tant aux futurs utilisateurs qu'au maître d’ouvrage. Aujourd’hui, les maîtres d’ouvrage ont d’ailleurs bien détecté le besoin de nature exprimé par les citoyens et sont de plus en plus sensibles aux enjeux environnementaux en général.
La règlementation pousse également à proposer de nouvelles conceptions urbaines qui laissent entendre qu’un projet de bâti intégrant la biodiversité sera commercialement avantagé. Prendre en compte la biodiversité peut permettre de maximiser des crédits pour les certifications. Pour les nombreux acteurs du secteur, cela est un atout marketing majeur, qui dépasse les contraintes supplémentaires qui peuvent être engendrées aux niveaux technologiques et organisationnels.
Occurence du terme "biodiversité" dans les dépêches AFP (source:Alternative économique n°196. Aout-Sept 2008)
L’exemplarité qui émane de tels aménagements est importante, notamment pour des maîtres d’ouvrage publics. Aujourd’hui, il n’est souhaitable pour aucun acteur de la société d’être mis en avant pour les pollutions ou les dégradations à l’environnement qu’il engendre. Les enjeux de la perte de la biodiversité sont de plus en plus mis en avant, ce qui peut-être un argument non négligeable. Le bâtiment à biodiversité positive permet de se différencier de toutes les autres constructions même exemplaires sur le plan environnemental (faible consommation d’énergie, matériaux à faible impact) puisque la biodiversité se voit !
La biodiversité est plus que jamais au cœur des préoccupations politiques, et les enjeux stratégiques à se positionner en faveur de celle-ci sont évidents, du point de vu politique, stratégique et commercial.
Durcissement des exigences règlementaires
Un durcissement des exigences en termes de prise en compte de la biodiversité est à prévoir, notamment dans les documents d’urbanisme et par anticipation aux futures lois envisagées par le grenelle de l’environnement. Des Schémas Régionaux de Cohérence Ecologique (SRCE) sont en construction, ainsi que les Trames Vertes et Bleues (TVB qui devraient être traduites dans les documents d’urbanismes (SCoT, PLU…). Divers projets mis en avant par les discussions du plan « restaurer et valoriser la nature en ville » du MEEDDM vont dans ce sens.
Renforcement des certifications à prévoir
Si la biodiversité n’est pas aujourd’hui approfondie dans les référentiels de certification, cette lacune est sur le point d’être rattrapé : le référentiel Anglo-saxon BREEAM© est déjà beaucoup plus exigeant que les autres. Ces derniers tendent à évoluer, notamment le référentiel HQE© avec la fameuse et tant attendue « quinzième cible ».
Un moyen de répondre aux certifications
Malgré les lacunes actuelles, la biodiversité peut permettre d’optimiser les niveaux de performance obtenus dans les processus de certification, en améliorant l’isolation thermique et acoustique, en améliorant les performances sanitaires, le cadre de vie et surtout l’intégration dans l’environnement. La cible 1 du référentiel HQE par exemple traite déjà de cette thématique.
Les quatre principaux référentiels utilisés en France, HQE®, BREEAM®, LEEDS® et H&E® abordent directement ou indirectement la question de la biodiversité locale. La « quinzième cible » qu’est la biodiversité n’existe pas encore, mais sera intégrée tôt ou tard ; autant s’y préparer. A court terme, l’intégration d’une thématique biodiversité forte dans les objectifs des processus de certification permettra d’optimiser les niveaux de performance.
Quelles cibles prennent en compte la biodiversité dans ces référentiels et seront donc très performantes pour mon projet ?